Le souffle est le seul compagnon qui nous accompagne fidèlement du premier au dernier instant de notre existence.
Notre rapport au souffle conditionne notre vie physique, psychique et spirituelle.
D'un point de vue physique, le souffle est le garant du bon fonctionnement de nos cellules via des échanges gazeux, il assure donc l'équilibre du corps dans son ensemble.
Son manque a de graves répercussions sur notre corps mais également notre psychisme.
Quand à notre évolution spirituelle, elle dépend entièrement de notre capacité à nous laisser traverser consciemment par le souffle de vie ou divin, présent en chaque être.
Le souffle est à la fois inconscient et volontaire, je n'ai pas besoin de penser pour respirer mais je peux en y pensant, le rendre plus vaste, plus profond, plus lent.
Nous vivons donc comme nous respirons.
Ce constat est la base du Yoga, qui vise par des pratiques, éthiques, posturales, respiratoires la réalisation du Soi ou essence Universelle présente en chaque être.
Cette réalisation est possible lorsque le pratiquant atteint" Samadhi" (8e pillier du yoga), c'est un état où tous les conditionnements disparaissent pour laisser la place à une présence Totale, un état d'Être.
Parmi les conditionnements abolis en Samadhi, il y a ceux liés au souffle; le besoin vital d'inspirer (pour faire le plein d'oxygène) et celui d'expirer (pour éliminer l'excès de gaz carbonique).
C'est l'équilibre de ces besoins qui nous maintient habituellement en bonne santé , mais lorsque Samadhi est atteint les besoins conditionnés par un état ordinaire disparaissent également (du moins pour un temps).
C'est ainsi que se révèle Kevala Kumbhaka ou la suspension du souffle.
C'est un processus involontaire dans lequel nul besoin d'inspirer ou d'expirer, et qui offre une sensation profonde de plénitude.
Pour les Yogis, la mort étant le départ du souffle, lorsque celui-ci se suspend on goûte à l'Eternité.
Pour ma part j'avais 13 ou 14 ans lorsque j'ai vécu ma première expérience de Kevala Kumbhaka.
Je nageais et m'entrainais à l'apnée régulièrement, quand un jour au fond de la piscine, en regardant vers la surface, j'ai senti un profond changement en moi.
Je n'avais plus besoin d'expirer ni d'inspirer, j'avais le sentiment de pouvoir rester ici pour toujours, un moment de plénitude totale.
Je ne me souviens pas de ce qui m'a sorti de cet état, mais je ressens encore 30 ans plus tard les traces que cette expérience a imprimé en moi, comme une référence d'un autre état possible où la souffrance liée aux besoins disparait.
Bien évidemment on ne peut pas décider de vivre cela, car la suspension du souffle n'est pas sa rétention volontaire, mais avec une pratique régulière de Pranayama (respirations yoguiques), et un lâcher prise de toutes attentes ou désirs de contrôle, nous pouvons préparer le terrain pour que de telles expériences se révèlent le moment venu.
La première chose indispensable est de porter attention à notre souffle, en développant une relation amicale (ni trop pressante ni nonchalante).
Comme toute amitié le souffle demande de l'investissement, du temps et du respect mais c'est la seule dont dépend réellement notre vie.
Que le souffle soit avec vous ;)
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